Cette corde qui m’attache à la terre renferme tout un univers, celui d’un village moldave à l’époque soviétique, qui tient dans les paumes d’une petite fille. Elle observe ce qui se passe et ce qui lui arrive avec innocence et un besoin désespéré d’être comprise. Objets, sensations et personnages peuplent son monde, de l’excentrique tante Muza à la vieille Dochia, la guérisseuse, en passant par le grand-père, « Prince Charmant » vieilli, et Raïa, la bibliothécaire, de retour de Sibérie… Tout est désir de partir dans le « vaste monde » pour cette petite fille, loin de l’endroit où elle est née, loin des vies des autres, des superstitions, des traditions ou du poids d’une Histoire qu’elle laisse subtilement entrevoir. La voix solaire et tempétueuse de la narratrice nous accompagne au fil des pages comme dans une comptine. Lorina Bălteanu retranscrit avec finesse la fantaisie, les angoisses et les réflexions obsessionnelles à la fois naïves et matures de cette enfant, tout en peignant la poésie d’un quotidien parfois rude. Cette corde qui m’attache à la terre est un très beau roman sur l’enfance, le passage à l’adolescence, la relation à la famille et à la communauté autant qu’une ode à la liberté. C’est surtout un livre d’une grande sensibilité, qui porte en lui une petite musique profonde, drôle, délicate et inoubliable.
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